Fruit d’un travail universitaire de second cycle…
Ce travail s’appuie sur ma pratique à titre d’enseignant de français en troisième secondaire. Je possède vingt-deux ans d’expérience et la majeure partie de mon enseignement s’est déroulée au même niveau. L’école secondaire Augustin-Norbert-Morin compte 1 100 élèves qui évoluent dans des programmes et concentrations tels le ski-étude, la danse-étude et le basket-étude. Elle offre également des parcours réguliers et différenciés. Cette école est considérée implantée dans un milieu favorisé.
Même après vingt-deux ans, je considère que je suis en apprentissage constant. Le milieu de l’éducation est en évolution constante et je considère qu’il faut être au courant des dernières tendances. Je n’ai jamais eu peur de sortir de ma zone de confort ni de me remettre en question. La décision de m’inscrire à ce cours est donc pour moi tout à fait réfléchie. Je veux installer dans mes classes un climat propice à l’apprentissage, que chacun y trouve son compte. J’ai choisi la stratégie du langage afin d’y parvenir. Ce qui m’a frappé de plein fouet en écoutant la conférence du professeur Bissonnette, c’est que j’avais tendance, pour encourager mes élèves, à leur dire «C’est facile…vous le faites depuis longtemps…» Si ces fameux participes passés ne sont pas encore acquis, ce ne doit pas être si facile…Ne pas qualifier les apprentissages…pas facile!
Plus précisément, mon groupe-tuteur me servira de laboratoire. Formé de 18 filles et 14 garçons, ce groupe (régulier) est plutôt faible (66% de moyenne au bulletin 1) et représente un beau défi. La stratégie que j’ai choisie a été appliquée en novembre et décembre. Si j’ai tenu le même langage dans mes quatre groupes, j’ai retenu les commentaires du groupe 33 seulement.
Le contexte d’application de la stratégie
«Marcher ma classe…» et donner une dictée depuis l’arrière de celle-ci s’est avéré une drôle d’expérience. Peu habitués, les élèves se sont mis à me chercher, à se retourner, à demander pourquoi. Je sais que ça n’a pas grand-chose à voir avec la stratégie choisie, mais c’est cette activité qui m’a amené à leur dire que j’étais inscrit à un cours pour devenir un enseignant efficace, quelqu’un qui serait capable de les aider…encore plus…Je leur ai aussi expliqué pourquoi on ne devait pas qualifier les apprentissages en facile/difficile, que cela pouvait devenir encore plus décourageant pour quelqu’un qui éprouve des difficultés. Ainsi, il faut amener les élèves à se dire :« Je peux réussir à condition que je fournisse les efforts nécessaires (rôle de l’élève) et que je m’y prenne d’une bonne façon (rôle du prof., du parent), «car seul l’élève peut apprendre ce qu’il a à apprendre.» (Steve Bissonnette).
Description et analyse des efforts observés chez les élèves
Au début de la période qui a suivi la dictée, j’ai pris le temps d’expliquer pourquoi j’allais les questionner davantage et surtout, que ce n’était pas pour les piéger mais pour les aider à comprendre ce que j’enseignais. Je leur ai donné une façon de travailler, d’analyser les participes passés du plus simple au plus complexe (seul, avec être et utilisé avec avoir). Une méthode, donc, qu’ils pourraient utiliser tout au long de l’année. Par divers ateliers : drill, TNI, dictée, cahier…les élèves avaient la même façon de travailler.
La mise en application m’a permis de constater que les élèves tendaient à se défiler lorsque je leur posais une question du type : «C’est facile?» C’est facile, effectivement, de répondre oui. Par contre, quand j’ai appelé Nicolas à mon bureau et lui ai demandé de m’expliquer ce qu’il comprenait, j’ai obtenu beaucoup plus de renseignements. Pour l’élève, je suis convaincu qu’il est plus valorisant de percevoir que l’enseignant sait qu’il n’est pas complètement ignorant. J’ai obtenu la même chose de la part de Mylène, élève-type qui dit ne jamais rien comprendre. Lorsque j’ai pointé un accord réussi plutôt complexe sur sa feuille, je lui ai demandé si elle voulait nous l’expliquer au TNI. Elle n’a pas hésité une seule seconde. Plusieurs élèves ont ensuite défilé au tableau et ma foi! J’ai été agréablement été surpris.
Description et analyse des effets observés sur la pratique professionnelle
Je pense qu’il est primordial de s’arrêter et de se questionner sur nos pratiques d’enseignement. C’est pourtant à la portée de tous…mais c’est un tout autre débat. Le fait de s’autocritiquer ne peut être que bénéfique dans toutes les sphères de notre vie et notre profession n’y échappe pas.
Lorsque je prends le temps de choisir les bons mots en questionnant un élève, de travailler avec lui, je suis à même de constater comment il comprend, je peux bonifier ou corriger certaines représentations. Oui, il y a le fameux contexte de la classe (32-35 élèves par groupe), mais il ne faut pas s’arrêter à cela. La stratégie du langage me permet de mieux aider mes élèves puisque leurs réactions me permettent d’expliquer une même notion de façon différente.
Conclusion
Ce qui m’a le plus frappé après avoir instauré cette stratégie, c’est le climat de la classe. Ce n’était pas un groupe turbulent et il ne l’est pas devenu. Par contre, j’ai senti qu’une bonne dose de confiance leur avait été infligée…reste à voir ce qui se sera passé dans les productions écrites. Le fameux transfert ce sera-t-il fait?
Autre constat : il est impératif qu’une bonne gestion de classe soit établie dès le départ. Comme j’ai beaucoup travaillé en individuel, il était important que l’autorégulation survienne assez tôt dans le cours…mais ils ont bien fait ça, je suis fier d’eux!